RÉGULARISER LES SANS PAPIERS ET INTÉGRER LES RROMS EN EUROPE ?

Un intervenant

La première chose qui me choque un peu à travers cette conférence, c’est l’intitulé : « Régulariser les sans-papiers et intégrer les Rroms en Europe ». Ce sont 2 problématiques qui n’ont rien à voir. On ne parle pas d’immigration pour les Rroms, on parle de mouvement de population. Ce sont des Européens. Les Rroms sont la première minorité démographique en Europe. Ils représentent 10 à 15 millions de personnes. En Roumanie, c’est la première minorité, ils sont 10 % de la population. Cela n’a rien à voir avec les sans-papiers dont on a parlé tout à l’heure.

La France a la capacité d’accueillir 15 à 17 000 ressortissants communautaires. je ne crois pas au discours, et là je vous rejoins, qui consiste à dire que les Rroms n’ont pas vocation à rester en France. Vous vous rendez compte qu’un représentant de l’Etat, un haut dignitaire, qui est le ministre de l’Intérieur, Manuel Valls, tient ces propos.

 

 

 

Une intervenante

A madame Danielle Simonnet. Quelle est la politique que vous proposez car je ne la vois pas.

 

 

 

Une intervenante

C’est un appel au secours. J’habite à Saint-Gratien où il y a un foyer IDFI qui a été créé en 2010. Parmi les gens qui y habitent, il y a des gens qui viennent des Tchétchénie, des pays de l’Est, il y a des Rroms aussi. Le problème n’est pas là. La mairie a refusé de mettre les enfants à l’école, donc il s’est créé une association. Nous avons été soutenus par une avocate, Me Bullagic. Nous avons réussi à ce que les enfants aillent à l’école. Ensuite la mairesse a refusé que ces enfants aillent à l’étude, à la cantine, à la piscine, à la médiathèque, aux activités du mercredi. Donc à nouveau, nous avons mis la mairesse devant les tribunaux. Nous avons gagné, mais nous n’avons gagné que des batailles mais nous sommes en train de perdre la guerre car elle a rendu la vie impossible à l’acheteur du foyer. Ce qui fait qu’il a vendu son foyer à France Habitation et nous ne l’avons su il n’y a qu’une semaine. On veut éparpiller les gens qui y habitent dans d’autres foyers. Le foyer à Saint-Gratien était bien entretenu mais ils vont se retrouver dans des foyers où il y a des cafards, des immondices. Ils ne veulent pas partir.

 

 

 

Danielle Simonnet, secrétaire nationale au PG chargée de l’immigration et candidate à Paris

Je suis très émue par l’intervention de la femme qui combat dans un comité de soutien. Bon courage à nous tous, il faut qu’on tienne, et soyons fiers de nos émotions parce que cela veut dire qu’on a toujours l’humanité au fond de nous et qu’on est toujours révoltés par ces situations. C’est important de ne jamais perdre cela. Ne perdons jamais cela. Nos collectifs militants doivent continuer à se développer. Nous nous concevons comme des élus militants, et nous devons le rester pour justement ne jamais tomber dans une recherche électoraliste de voix qui nous amènerait à passer à côté de l’essentiel, notre combat pour l’émancipation humaine. Pour moi, c’est la souveraineté du peuple qui a constitué la nation et non l’inverse. Et c’est cette souveraineté populaire, le fait qu’il y ait un peuple, qui participe à une communauté de destins et qui définit quel est l’intérêt général, qui est légitime pour exercer cette souveraineté qui est la base du fait politique collectif. Je suis bien sûr hors de moi, et je l’ai dit à tous les socialistes que j’ai croisés dans la manifestation de samedi dernier. Parce que dans cette manifestation, il y avait un petit degré d’hypocrisie de la part de certains qui se pavanaient dans cette manifestation antiraciste alors qu’ils ont cautionné l’abandon du droit de vote des étrangers aux élections locales qui nous a été promis et que l’on attend depuis si longtemps. Moi je l’attends depuis 1981. Je peux vous dire qu’on l’attend depuis la Constitution de 1793 qui stipulait que tout citoyen, tout vieillard qui justifiait d’humanité a le droit de participer à l’intérêt général –e ne sais plus la phrase exacte. Donc depuis 1793. Soyez des républicains fiers de l’être.

Encore une phrase sur la question des travailleurs sans papiers. Ce qu’il faut comprendre, c’est que notre Union Européenne s’est hélas construite comme un grand marché commun basé sur le dogme de la concurrence libre et non faussée, avec une idéologie ultra-libérale qui voudrait nous faire croire que le problème c’est le coût du travail et que pour sortir de la crise, il faudrait baisser le coût du travail. Il faudrait donc encourager le dumping social et la mise en concurrence de tous contre tous pour diminuer le coût du travail. Dans ce discours idéologique, il y a une fonction au fait qu’il y ait des catégories de travailleurs sans droits, surexploités, pour pousser vers le bas la baisse du coût du travail. Il faut bien comprendre que garantir l’égalité des droits par le biais de la régularisation de l’ensemble des travailleurs et travailleuses sans papiers est une revendication à l’avantage de l’ensemble des salariés. C’est la même chose pour les Rroms. Leur permettre d’accéder aux droits communs fait qu’on rompt les politiques de précarité, qu’on s’oblige à répondre aux politiques sociales et que c’est à l’avantage de toutes et tous.

 

 

 

Marie Christine Vergiat, Députée Européenne Front de Gauche

Le niveau national et le niveau européen ne doivent jamais être contradictoires. L’Union européenne n’est rien d’autre que l’ensemble de ces Etats membres. Et ces Etats membres, aujourd’hui plus que jamais, jouent l’entité européenne contre les Etats membres. Quand on appelle à la solidarité européenne, notamment sur des questions comme celles-là, comme on n’est pas dans des compétences dures de l’Union européenne, il ne peut rien se faire sans l’accord des Etats membres. Et Danielle a raison de dire qu’un Etat comme la France, si elle était exemplaire en la matière, pourrait avancer les choses et pourrait faire progresser les politiques en la matière. On en est bien loin.

Autre chose, je veux bien qu’on parle de tout et n’importe quoi. Mais qu’on ne mélange pas l’Union européenne et le Conseil de l’Europe. Leurs politiques ne s’appliquent pas de la même façon. Et non, quand on parle de Rroms au niveau de l’Union européenne ou au niveau du Conseil de l’Europe, il n’y a pas des tziganes, manouches, gitans qui s’opposent aux autres Européens. Il y a des Rroms qui sont une communauté de 15 millions de personnes à l’intérieur du continent européen qui sont 10 à 12 millions à l’intérieur de l’Union européenne. Cela veut dire que la majorité des Rroms aujourd’hui, sur le continent européen, sont des citoyens européens.